Mardi 08 novembre 1994
18 ème Conférence des Chefs d'Etat de France et d'Afrique
Biarritz
Tous ceux qui ont été invités ont répondu à l'appel. Pour sa dernière rencontre avec les chefs d'État africains, le président Mitterrand, l'un des derniers dirigeants français, avec Jacques Chirac, à éprouver pour le continent noir des sentiments où l'expérience se mêle à l'affection, a fait salle comble: 27 chefs d'État et 35 délégations ont répondu à l'invitation de Biarritz. À La Baule, voici 4 ans, ils n'avaient été que 22 à entendre l'appel à la démocratisation.
C'est que cette fois, désireuse de démontrer «urbi et orbi» son intérêt pour l'Afrique en espérant que le message sera reçu à Londres et Washington, la France a ratissé large. Sous la bannière d'une communauté d'États francophones ou amis, la France a rassemblé, en plus des chefs d'État issus des anciennes colonies françaises, une délégation sud-africaine conduite par le vice-président Thabo Mbeki, les présidents du Zimbabwe, d'Érythrée, d'Éthiopie, d'Angola.
S'ils ont ainsi répondu à l'appel, c'est parce que les dirigeants africains, toutes générations confondues, ont le sentiment que le monde se désintéresse de leur continent qui, du sida jusqu'à la famine et le génocide, est devenu l'incarnation de toute la douleur de la planète et que toute main secourable, quelles que soient ses motivations, mérite d'être saisie.
Qui d'autre que la France, en effet, pouvait offrir un tel décor aux représentants de pays parmi les plus pauvres du monde? Les chefs d'État seront logés sous les lambris de l'hôtel du Palais, où Napoléon III coula naguère des jours heureux avec l'impératrice Eugénie. Ou dans les luxueux appartements de l'hôtel Miramar, qui domine l'océan. Quant au roi Hassan II du Maroc, il a voulu marquer sa différence avec ceux qui doivent pouvoir et fortune à des coups d'État militaires, des élections truquées ou contestées ou, trop rarement encore, à un scrutin démocratique. Lui, le descendant du commandeur des croyants, il ne s'est pas contenté de réserver le Regina, l'un des plus beaux hôtels de Biarritz, il a aussi tenu à le modifier. Une tente blanche a été dressée dans les jardins, des cloisons intérieures ont été déplacées et une cour de marbre devrait accueillir un sompteux méchoui.
(BRAECKMAN,COLETTE www.archives.lesoir.be)